Témoignage - “J’ai été touchée par des phobies d’impulsions très sévères envers ma fille”

« Ce fut la période la plus difficile de ma vie, et pourtant, aujourd’hui, je la remercie. Elle m’a permis d’entamer un long processus de guérison. Ces traumatismes seront toujours présents, car ils font partie de moi… mais je peux enfin avancer »

Voici mon histoire :

J’ai 29 ans lorsque je donne naissance à ma fille, Lara, le 13 avril 2025. Un accouchement de rêve, exactement comme je l’imaginais : tout en douceur, dans une bulle de sérénité. Les premiers instants sont tout simplement magiques. On ne pouvait rêver mieux. Son papa et moi sommes sur un petit nuage. Notre bébé nous comble de bonheur. ️

Jamais je n’aurais cru qu’à seulement trois mois et demi de sa vie, je traverserais l’une des périodes les plus sombres de la mienne. Et pourtant…

Sans prévenir des pensées intrusives surgissent, violentes, incontrôlables, et centrées sur ma fille. Je m’imagine faire des choses terribles. Je ne comprends pas ce qui m’arrive. Je prends rendez-vous avec une psychologue. Le verdict tombe :
« Vous faites des phobies d’impulsion, Madame. C’est très fréquent en post-partum. »
Je lui parle du foyer dans lequel j’ai grandi, ravagé par l’alcoolisme, la violence physique et la négligence affective. Elle m’explique qu’une enfance marquée par de tels traumatismes laisse des traces profondes et durables, même à l’âge adulte. Pour résumer, je suis en plein syndrome de stress post-traumatique. Je revis mon enfance sous forme de phobies d’impulsions extrêmement violentes. 

Je veux me libérer de tout ça. Alors, nous planifions une thérapie qui commencera début septembre, après les vacances d’été de ma psychologue.

Après ce premier rendez-vous, mon état s’empire. Je me remémore de nombreux souvenirs liés à mon enfance. J’écris tout ce dont je me souviens dans un carnet. Les pensées intrusives deviennent constantes, violentes, étouffantes. Je ne me reconnais plus. Je suis dépassée. J’ai l’impression de perdre pied, de devenir folle. Je pleure chaque jour. Je donnerais tout pour que mon cerveau cesse de penser, ne serait-ce que quelques instants.

Un soir, je suis seule à la maison avec ma fille. Mes pensées sont si intenses que je fais une crise d’angoisse. Je suis obligée d’appeler un numéro d’écoute psychologique, je reste en ligne avec une personne bénévole plus d’une demi-heure. Je suis en détresse. 

Ma thérapie doit commencer dans quelque jours mais la douleur psychique est si forte que je me résous à consulter un médecin généraliste le 25 août, jour où je suis censée reprendre le travail après six mois de congé maternité. J’ai besoin d’aide. Je me rends au rendez-vous. Je rentre dans le cabinet et je m’effondre en pleurant. Je parle de mes pensées intrusives à la médecin. Elle m’écoute avec bienveillance.

Lorsque je lui dis que je souhaite reprendre le travail, elle refuse. Elle me sent trop fragile. Je lui demande des antidépresseurs. Finalement, elle me prescrit des anxiolytiques : « c’est plus fort et plus rapide » me dit-elle. Elle me propose un arrêt de travail prolongé pour me laisser le temps de souffler. Je refuse, je veux retourner travailler dès le lendemain, pour occuper mon esprit.

Je me souviendrai toujours de ses mots rassurants :
« C’est très bien ce que vous avez fait. Vous êtes courageuse d’en avoir parlé. Je sais qu’en ce moment, vous n’en avez pas conscience, mais vous allez vous en sortir, Madame. »

Je repars avec une ordonnance d’anxiolytiques et un arrêt de travail pour la journée, sur lequel est écrit noir sur blanc :
« Dépression sévère post-partum. »

Le coup de massue. Le véritable motif de mon état n’était pas une dépression post-partum. Voici ce qui aurait dû être écrit :
« Phobies d’impulsions dues à des traumatismes de l’enfance ».

La médecin souhaite me revoir en visio dès le lendemain matin, afin d’évaluer si je suis en état de reprendre le travail comme je le souhaite. Je suis sous anxiolytique et mon métier exige une vigilance particulière. Elle insiste pour que mon mari, Valentin, soit présent lors de l’appel.

Pendant le rendez-vous, elle nous explique que malgré le fait que mon état l’inquiète, deux éléments la rassurent : le fait que Valentin soit à la maison, capable de veiller sur moi, et ma lucidité face à la situation. Elle m’alerte sur les risques d’un retour au travail trop précoce et sur la possibilité que cela alourdisse encore davantage ma charge mentale.

Mais dans ma tête, c’est décidé : je veux y retourner. Je retourne au travail après un jour d’arrêt de travail. Elle décide de m’orienter rapidement vers l’une de ses collègues psychiatre. Ce médecin pendra de mes nouvelles chaque soir pendant une semaine. A ce stade, je ne savais pas encore que je la reverrai quelque semaine plus tard et que je la remercierai du fond du cœur pour ce qu’elle a fait pour moi.

C’est fragile, mais c’est là : les anxiolytiques apaisent un peu mon esprit, et l’idée d’être suivie par une psychiatre et une psychologue me rassure. La reprise du travail me permet de penser un peu moins. Je peux enfin souffler, avant de commencer ce long travail de guérison.

Le vendredi 29 août, je consulte la psychiatre, qui me met sous antidépresseurs afin d’apaiser mon esprit le temps que ma thérapie débute. Elle confirme le diagnostic de phobies d’impulsions et non celui d’une dépression post-partum. Elle est confiante quant à la suite et me rassure sur la guérison. Je lui parle également de mon changement de poste au travail prévu dans quelques jours. Elle me propose un arrêt de travail afin que je puisse prendre soin de moi. Je refuse une nouvelle fois car je veux rester active, continuer à avoir une vie normale, même sous antidépresseurs et anxiolytiques.

Le 2 septembre, je débute enfin ma première séance de thérapie avec ma psychologue. Sandra est très bienveillante et à l’écoute. Nous nous voyons deux fois par mois pour faire de la thérapie LI-ICV. Nous sommes fin décembre et les phobies d’impulsions ont bien diminué. Il m’arrive d’avoir la crainte qu’elles réapparaissent soudainement. Ce fut de loin la période la plus difficile de ma vie, et pourtant, aujourd’hui, je la remercie. Elle m’a permis d’entamer un long processus de guérison. Ces traumatismes seront toujours présents, car ils font partie de moi… mais je peux enfin avancer. 

Ces choses qui m’ont sauvé et qui peuvent peut-être vous aider :

  1. Parler de ses pensées à son conjoint.

  2. Prendre rendez-vous avec un professionnel de santé (psychiatre, psychologue ou médecin généraliste). Lui seul peut poser un diagnostic précis et nous orienter si besoin.

  3. Avoir sous la main des numéros d’écoute et de soutien psychologique.

  4. Écrire ses pensées, tenir un journal de bord.

  5. Une fois que l’on a fait toutes ces choses : patienter, laisser la tempête passer et faire de sa santé mentale une priorité dans chaque décision du quotidien.

  6. Quand on est en train de vivre un tsunami, on a l’impression que toutes ces choses ne nous aideront pas et qu’on ne s’en sortira jamais… et pourtant on peut retrouver le la sérénité.

Merci à Laurie pour ce témoignage qui pourra, je l’espère, vous aider !

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